dimanche 12 juin 2016

Faut-il escouiller les mâles pour les garder à la maison (une histoire de l'îlot Maes, Van Volsem, Venise)


Stoemp était un compagnon infidèle, un fugueur récidiviste, un habitué des cavales nocturnes du début du mois de juin.

Il y a trois ans déjà, en 2013, la Mère Michel, exaspérée, avait placardé un message angoissé un peu partout dans le quartier d'Etterbeek où le couple habitait à l'époque pour signaler la dernière trahison et disparition de son conjoint « dans la nuit du 6 juin au vendredi  7 (…)  soit via les toits de l’avenue Hansen Soulié soit via un échafaudage »

Tout le monde connaissait Stoemp-le-séducteur dans la commune d'Etterbeek où le coquin de la Mère Michel avait coutume de tendre ses embuscades à la sortie de l'athénée Jean Absil, des cinémas, des mosquées ou des églises, aux arrêts de bus ou à la station de métro Pétillon, dans les snacks à pittas, s’attaquant d’abord aux plus vulnérables : les lentes et les naïves, les imprudentes, les paumées et les réfugiées, une jeune adolescente (rêvant naïvement d’avoir une chambre pour elle toute seul avec une porte qui ferme à clef), les myopes et les crapaudes, celles qui avaient pas l'habitude de porter des souliers à hauts talons et ne savaient pas bien courir...

On supposera cependant  que la paix aura fini par revenir dans le ménage, que le cavaleur, revenu à de meilleurs sentiments, affamé ou fauché, aura réintégré le foyer conjugal et qu’il aura été gourmandé et pardonné et qu’il aura  même promis… Kasi akosi ye ! Et d’ailleurs la Mère Michel n’aurait pas vraiment supporté ça ! Il faut comprendre ! Ata yo moko !,  à son exigeante et autoritaire maîtresse de se faire escouiller pour ne plus jamais « faire de bêtises ». Et que les partenaires, enfin réconciliés, auront déménagé, passant d’Etterbeek à Ixelles, pour se refaire une réputation de couple roucoulant dans une commune et un quartier paisibles où personne ne les connaissait…

Ah mokili ! Voilà que, trois ans après, en 2016, la Mère Michel, a été amenée à placarder le même message angoissé (dont elle avait, fort heureusement conservé une copie) dans son nouveau quartier pour signaler une autre disparition inquiétante de son coquin qui, cette fois-ci, se serait produite « dans la nuit du jeudi 2 juin au vendredi  3 (…) via  les jardins du bloc rue Van Volsem, rue de Venise, rue Maes ». Elle en a glissé des photocopies corrigées à la main dans toutes les boîtes aux lettres et sous toutes les portes du quartier. Elle a demandé à Ichab, l’épicier de la place Hendrik Conscience, d’ouvrir l'oeil et de tendre  l’oreille et a invité ses voisins à la collaboration et
- Pouvez-vous vérifier s’il  ne s’est pas réfugié dans vos caves, garages,  puits de lumière, greniers ?
à la délation.Elle les a implorés de lui communiquer toutes informations « qu’elles soient bonnes ou mauvaises ».

Que s’est-il donc passé ?  La Mère Michel, désespérée, prétend que Stoemp s’est perdu… alors que le coquin s’est probablement évadé !
Eh oui ! le matou tricolore, au pelage entièrement noir (avec quelques reflets bruns au soleil), aux yeux jaunes et au collier rouge ne s’était pas résigné à terminer sa vie comme l’animal totémique de la Belgique : un lion de basse-cour,  un prédateur désactivé et lobotomisé, un eunuque aux poils billeux, un escouillé à la barbe de missionnaire barbouillée de jus de chique et de jaune d’œuf !


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